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Merci la Chirurgie, histoire d’un petit sprat*

Merci la Chirurgie

Je suis né le 24 novembre 1980. C’était un lundi je crois. C’est toujours un peu plus difficile le lundi !

A ma naissance, l’examen clinique a trouvé un souffle cardiaque important. J’avais un trou entre mes deux ventricules ce qui pertubait quelque peu les flux sanguins. Heureusement, une autre malformation me protégeait de la première : ma valve pulmonaire est un peu trop petite, les docteurs parlent d’une sténose pulmonaire. On dit que ma sténose me protège des conséquences de ma CIV car elle évite de surcharger l’artère pulmonaire qui n’encaisse pas très bien le surplus de boulot en général.
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Quand bien même une anomalie compense une autre, mon petit coeur devient gros. Il se fatigue. J’ai du mal à prendre un biberon sans m’étouffer et du coup je ne grandis pas. C’est couillon car les docteurs voulaient que je fasse au moins 7 kg pour m’opérer. Chiffre magique.

J’y suis arrivé (aux sept kilos) et le 11 mai 1982 j’ai été opéré d’une communication interventriculaire sous infundibulaire au centre médico-chirurgical de Marie Lannelongue. Le Professeur Jean-Paul Binet a donc ouvert mon thorax de sprat* pour aller mettre une rustine dans mon septum interventriculaire.

L’intervention s’est bien passée, celui qui se décrivait comme « un mécano de Dieu »  était satisfait de son geste.

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Le post-op a quand même l’avoir d’avoir été émaillé de complications histoire d’angoisser encore un peu plus mes parents qui devaient déjà avoir leur dose. Hum. Joueur je suis.

Finalement, je sors plutôt bien de cette histoire. Je grandis, les cardiologues qui me suivent jusqu’à mes 20 ans sont tous rassurants*** : « super résultats, il fera ce qu’il veut dans la vie, limitez peut-être juste le sport en compétition. »

Aujourd’hui, je connais mon corps, je sais qu’il a des limitations. Ma valve pulmonaire est toujours rétrécie. Mais je n’y pense pour ainsi dire jamais. A tel point que j’établis des stratégies d’entraînement sportif alambiquées pour grignoter des secondes dans un triathlon alors même que j’aurais toujours un petit frein dans ma poitrine.

J’en viens quand même à l’objet de cette note. J’ai essayé d’écrire au CMC Marie Lannelongue mais je m’y suis pris trop tard, le Pr Binet était décédé. Alors comme on peut tout faire avec Internet, j’ai décidé de faire cette note pour traduire ma gratitude. Sans la Science, sans les Hommes qui la font, je ne serais pas là aujourd’hui. Ça m’a parfois angoissé dans mon enfance lorsque j’ai compris que je devais la vie à la culture, que dans la nature brute, je serais mort d’insuffisance cardiaque. Aujourd’hui, je trouve ça con. Alors voilà, juste merci.

merci à vous !
merci à vous !

 

 

 

*argot dunkerquois, synonyme de craquelot**

** comprendre petit poisson, des fois on voit à travers !

*** par contre après j’ai rencontré quelques khons comme écrirait Docdu16.

17 réponses sur « Merci la Chirurgie, histoire d’un petit sprat* »

merci ! je l’ai écrite spontanément, comme ça, d’un trait, grâce à un patient qui a annulé son bloc (ironie de l’histoire). Je vais essayer de retrouver ma radio de thorax de sprat, elle vaut le détour.

As-tu fait un petit tour sur le site de Tanguy de la Motte, (initiative cœur), coureur du Vendée Globe, dont les sponsors « sponsorisent » la chirurgie cardiaque de gamins ?

Merci Fred, porte toi bien 🙂 (j’ai causé de Gillespie et du Decathlon avec un apprenti pilote hier, ironie de la discussion c’est mon futur assureur :D)

Très belle note. Je suis moi aussi reconnaissant, non seulement aux médecins, mais à l’ensemble du personnel, à la science et au système social, qui ont rendu possible une opération chez moi un Wolff Parkinson White. Ca ne m’a pas sauvé la vie, mais ça m’a permis de faire ce que je voulais sans une épée de Damoclès aussi de ma tête.

Rappelons-nous cependant que tout n’est pas rose dans ce monde médical : il est sidérant et révoltant de constater comment le monde médical a pu accepter le Mediator pendant ce si nombreuses années. Pour certaines personnes, avoir à faire à ce monde-là aura été délétère ou meurtrier.

Merci pour votre commentaire. Tout n’est pas rose mais je voulais exprimer ma gratitude face à ce qui est le fondement de la Médecine : faire que les autres aillent mieux. Je voulais rappeler que c’était le coeur de la problématique médicale, surtout dans les dernières semaines où j’ai observé beaucoup de dénigrement contre le corps médical dans les réseaux sociaux.
Bonne journée

Très beau billet 🙂 et merci à vous aussi de partager vos mots et vos sentiments avec nous 🙂
Tout le monde doit remercier la chirurgie, les docteurs et les chirurgiens.

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