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Faut-il faire du fer en périopératoire ?

J’ai le sentiment que le fer injectable est de plus en plus poussé sur le devant de la scène par l’industrie pharmaceutique, Vifor Pharma en particulier. Cette entreprise suisse possède les marques Venofer et Ferinject. Depuis que le fer-saccharose (Venofer) est « génériqué », le carboxymaltose ferrique est poussé sur le devant de la scène.

Le sujet m’intéresse car je trouve que le transport de l’oxygène est un sujet sacrément important en médecine et la culture locale de mon hôpital est forte sur ce sujet avec historiquement un leader d’opinion fort sur la SvO2 et le rapport DO2/VO2. En tout cas, j’ai été élevé dans ce contexte. Néanmoins, le temps passe, la SvcO2 ne tient pas tant que ça ses promesses et/ou le sujet est un peu en disgrâce… (C’était pourtant intéressant d’envisager de transfuser selon le terrain, l’hémoglobine et la SvO2, coucou Ziko ! ).

Par ailleurs, j’ai toujours l’impression de donner mon propre sang lorsque je rédige une prescription de culot globulaire (note : j’avais écrit au pluriel au premier jet), surtout dans un contexte stable, en post-opératoire, je suis toujours dubitatif quant au rapport bénéfice/risque et un tweet m’a beaucoup marqué, je pense que c’était @boiteasavon qui disait qu’une transfusion c’était une (mini) greffe !

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Comment est-ce que j’appréhende la douleur aiguë ?

Je viens de lire cette note chez le brillant Litthérateute. Cela m’a donné envie de vous parler de ma façon d’aborder la douleur aiguë. Je suis médecin anesthésiste, la gestion de la douleur aiguë c’est vraiment une part importante de mon métier. Dans l’exercice de ce billet de blog, je me suis concentré sur ce que j’écris, dans le dialogue je ne suis pas une machine, néanmoins, j’insiste quant à l’importance du choix des mots +++

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Les béta-bloquants c’est pas tout le temps

Je me souviens bien d’une de mes premières visites pré-anesthésiques en premier semestre. Il s’agissait d’un patient au système cardio-vasculaire abîmé par le temps, la cigarette et un régime chti Deluxe. Peu habitué aux soins médicaux il n’avait pas de traitement. Les publications sur les béta-bloquants en périopératoire fleurissaient à l’époque et je me trouvais malin de réfléchir à une prescription d’un bétabloquant la veille de son intervention orthopédique… aujourd’hui je ne me pose plus ce genre de question, j’ai en effet un peu tendance à me méfier des béta-bloquants en périopératoire.

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Mon ami le potassium

 Le potassium c’est dangereux, c’est un des premiers trucs qu’on apprend en médecine : il ne fait pas bon avoir 7 mmol/l de potassium dans le sang et il faut être très vigilant lors des prescriptions de supplémentation intraveineuse. Une kaliémie (très) élevée tue.

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Cependant je préfère voir le potassium à 4,5 qu’à 3,5 mmol/l sur le ionogramme de mes patients, surtout en contexte post-opératoire. Il y a beaucoup de raisons qui concourent à trouver une hypokaliémie en post-opératoire : dénutrition, diminution des apports oraux, aspiration gastrique, diurétiques, nutrition parentérale, insuline. La renutrition trop rapide peut même aboutir à une hypokaliémie et une hypophosphorémie profonde avec des conséquences dramatiques. Il faut donc être particulièrement méfiant chez les grands dénutris, anticiper et surveiller.

Le potassium est le principal cation intracellulaire. Il est indispensable au maintient de la polarisation cellulaire et le travail de la Na/K ATPase représente probablement à l’échelle de l’organisme une proportion énorme de notre dépense énergétique de repos. Inutile de vous rappeler que le respect de ce gradient électrochimique est utile pour échapper à des tas de dysfonctionnements cardio-vasculaires ou neurologiques. Le potassium est également un cofacteur de la pyruvate kinase, enzyme plutôt utile.

Revenons à nos moutons : la kaliémie « normale-haute ». Pour ça j’essaye d’anticiper les apports chez les patients opérés, j’utilise préférentiellement le Ringer Lactate pendant les blocs, je veille à apporter régulièrement un peu de magnésium et je supplémente volontiers en phosphate dipotassique (contexte d’hypokaliémie/hypophosphorémie) ou en chlorure de potassium (en me souvenant de la chlorémie du patient). Il faut bien se souvenir que le pool potassique de l’organisme est énorme. Ainsi je pense qu’en dehors d’une fonction rénale précaire il est plus efficace d’apporter franchement le potassium (sur l’intervalle correct pour être safe bien sûr). Je retiens qu’il faut approximativement 200  mmol de potassium pour élever la kaliémie de 1 mmol/l chez un patient franchement carencé (attention aux contexte de transfert intracellulaire).  200 mmol d’ion K+ se trouve dans 15g de KCl

Par contre dès que la voie per os est utilisable, hop, potassium par la bouche, plus sécu et tout aussi utile ! De plus la physiologie est bien faite, si l’intestin et le rein sont fonctionnels ils ne se laisseront pas déborder par des apports élevés en potassium per os.

Je chasse donc activement les hypokaliémies qui favoriseraient la constipation, l’arythmie ou la faiblesse musculaire.

Je pense vraiment que la physiologie aime le potassium. Il y a beaucoup de travaux qui s’intéressent au déséquilibre entre les apports sodés et potassiques dans la genèse des pathologies cardio-vasculaires comme l’hypertension. Une alimentation riche en potassium (fruits et légumes) est régulièrement associée à des bénéfices sanitaires dans les études épidémiologiques.

D’autres sujets connexes sont passionnants comme l’utilité du mélange glucose-insuline-potassium (GIK) dans l’ischémie myocardique et les nouvelles pistes du rôle des pompes Na/K dans la régulation du cycle cellulaire. Mais c’est un tout autre sujet…

1.
D’Elia L, Barba G, Cappuccio FP, Strazzullo P. Potassium intake, stroke, and cardiovascular disease a meta-analysis of prospective studies. J Am Coll Cardiol. 2011 Mar 8;57(10):1210–9.
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He FJ, MacGregor GA. Beneficial effects of potassium. BMJ [Internet]. 2001 Sep 1 [cited 2014 Jun 4];323(7311):497–501. Available from: http://www.bmj.com/content/323/7311/497.pdf+html
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Adrogué HJ, Madias NE. Sodium surfeit and potassium deficit: keys to the pathogenesis of hypertension. J Am Soc Hypertens. 2014 Mar;8(3):203–13. Download
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Babula P, Masarik M, Adam V, Provaznik I, Kizek R. From Na+/K+-ATPase and cardiac glycosides to cytotoxicity and cancer treatment. Anticancer Agents Med Chem. 2013 Sep;13(7):1069–87.
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Cheng CJ, Kuo E, Huang CL. Extracellular potassium homeostasis: insights from hypokalemic periodic paralysis. Semin Nephrol. 2013 May;33(3):237–47.
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Pardo LA, Stühmer W. The roles of K(+) channels in cancer. Nat Rev Cancer. 2014 Jan;14(1):39–48.
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Youn JH. Gut sensing of potassium intake and its role in potassium homeostasis. Semin Nephrol. 2013 May;33(3):248–56.
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Aaron KJ, Sanders PW. Role of dietary salt and potassium intake in cardiovascular health and disease: a review of the evidence. Mayo Clin Proc. 2013 Sep;88(9):987–95.
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Grossman AN, Opie LH, Beshansky JR, Ingwall JS, Rackley CE, Selker HP. Glucose-insulin-potassium revived: current status in acute coronary syndromes and the energy-depleted heart. Circulation. 2013 Mar 5;127(9):1040–8.
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Fibrillation auriculaire en post-opératoire

La fibrillation auriculaire est fréquente après une chirurgie lourde, surtout s’il y a un abord thoracique. En chirurgie thoracique mon pifomètre me dit qu’il y a près de un patient sur trois qui fait un épisode de fibrillation auriculaire (FA).

Pour moi la FA est un signe d’alerte. J’évite de dégainer de l’amiodarone et de passer à autre chose. Je pense qu’il faut creuser un peu l’affaire. Je vous propose avec cette courte note ma « check-list passage en FA en post-opératoire ».

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Les perfusions post-opératoires

Je trouve que les prescriptions post-opératoires sont parfois un peu alambiquées. J’aimerais par le biais de quelques billets expliquer ma stratégie pour des prescriptions claires.

En préambule, je rappelle que des prescriptions ça se date et ça se signe. Les voies d’administrations doivent être précisées, il ne doit pas y avoir d’ambiguïté.

Les perfusions post-opératoires

Il faut les limiter au maximum. Tous les traitements peuvent générer de la iatrogénie, y compris les perfusions : erreurs d’électrolytes, hyponatrémie, infection de cathéter, débit trop rapide de nutrition parentérale, etc.