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Journal #COVID19 chapitre 1

J’ai besoin d’écrire pour garder une trace de tout ça.

J’ai entendu parlé du coronavirus COVID19 début janvier quand les premiers mails de la DGS sont tombés. Je me suis dit, tiens, ils ont un bon réseau de veille. Il fallait tout de suite prévenir le SAMU si quelqu’un revenant de Chine avait de la fièvre.

Premières blagues avec les copains pilotes d’avion, premières images d’une Chine à l’arrêt mais ça parait si lointain… pas de copain chinois à contacter, pas facile de lire le chinois sur le web…

Mi février, en vacances, pourtant en diète d’informations et réseaux sociaux, je vois que ça se tend fort en Italie et qu’il faut isoler chez eux les gens qui reviennent d’Italie, ça parait dingue comme mesure mais c’est que c’est sérieux, ma vigilance est clairement montée d’un cran. Il y a vite ordre et contre-ordre, on sent que ça va être compliqué.

Retour des vacances dans des trains bondés, on est dans le flou. Au travail je pense déjà à mettre un masque en consultation mais je ne ne fais pas par crainte d’être jugé catastrophiste ou de consommer des ressources inutilement. L’angoisse monte en moi, mais finalement faire des consultations, faire des trucs routiniers m’apaisent.

Vendredi 6 mars, je suis de garde, devant une pneumonie nosocomiale je me demande déjà s’il faudrait tester des patients mais le contexte n’est pas encore assez fort. Le 8 mars, je vais à un spectacle, inquiet, mais j’y vais. Et la salle est comble. Le 9 mars je vois l’épidémie qui s’apaise en Chine, ça me fait du bien.

Je comprends vraiment le problème le 10 mars à la lecture des retours italiens. L’allumette est craquée, je brûle vraiment intérieurement. On en est encore à réfléchir comment on va gérer des déplacements prévus prochainement, comment notre petit confort va être impacté.

Les collègues médecins appellent à l’aide pour des consultations de triage des cas suspects de COVID19. Je décide d’aller aider le dimanche suivant. C’est couillon mais je veux symboliquement me montrer solidaire. Je n’ai pas encore compris que l’anesthésie-réanimation va se prendre une grosse baffe.

Le Président de la République annonce la fermeture des écoles. Ça y est tout le monde va être impacté. Les chouineurs râlent. On commence à faire le tri entre les vrais cons et des gens en maîtrise.

Le dimanche 15 mars, j’aide au dépistage. J’ai un sentiment de futilité puisque le virus est désormais partout. A ce sentiment s’ajoute la tristesse de voir les élections se dérouler, des carnavals improvisés et d’autres réunions publiques.

Lundi 16 mars, tout le monde a une belle soeur qui sait de source sûre que le vrai confinement arrive. Manipulation de masse calculée via les réseaux sociaux ? Le discours du Président de la République est très bien calculé. De multiples astuces de langages et de communication sont utilisées pour transformer l’opinion. J’attendais quand même plus de fermeté. Il faudra attendre le discours du ministre de l’intérieur pour avoir des consignes plus précises. Ces calculs politiques de qui dit quoi me saoulent, « nous sommes en guerre » et on louvoie encore… #sigh Partout on perçoit la pression qui monte, les masques qui manquent, le SHA indisponible, etc. Je me sens encore plus éloigné que d’habitude des concepts de patriotisme et de nationalité quand je vois l’absence de respect des mesures. Je comprends aussi que l’opinion publique ne voit pas les malades, ils ne savent pas ce que c’est, c’est pour ça que ça leur échappe…

Mardi 17 mars, les rues se vident un peu, paradoxalement je n’ai jamais si peu eu besoin d’un masque à vélo pour aller travailler. La météo est magnifique et l’ambiance à l’hôpital est pesante. En anesthésie nous ne sommes pas encore dans le cyclone viral. Juste dans les coups de vent annonciateurs de l’ouragan : on déprogramme, on manipule les consultations, etc. on renvoit chez eux des collègues malades, on espère que le collègue parti à Tataouïne puisse revenir. Je vois le professeur Raoult qui essaye encore de buzzer. Je vois comme le souligne justement Florian Zores qu’on peut maintenant donner des cachetons dangereux sur la base d’une étude foireuse d’une vingtaine de sujets alors qu’on trouve toujours à critiquer des études avec des milliers de patients… dingo.

Il faut rester cool avant que la tempête n’arrive sur nos gueules. BRACE BRACE // BRACE BRACE

6 réponses sur « Journal #COVID19 chapitre 1 »

Courage. Toutes mes pensées vont vers toi, vers tous les soignants, et tous les autres qui restent en première ligne… jusqu’aux caissières des supermarchés.

Merci à toi et à tous les autres pour les sacrifices consentis.

Tous les cachetons sont dangereux.
Entre choisir qui va bénéficier d’un respirateur et vivre, et prendre le risque des cachetons dangereux, c’est quoi la meilleure option ?

Le problème c’est que la chloroquine on connait bien les EI cardiaques sans connaitre le bénéfice contre le coronavirus. Donc on ne ferait prendre que des risques sans arrière pensée claire d’un bénéfice. C’est embêtant non ?
Il y a déjà eu des cas de patients hospitalisés aux soins intensifs cardio car automédication par chloroquine et effets indésirables graves.

Quand on sera en situation très dégradé comme vous le décrivez et qu’il n’y aura plus d’accès en réa, peut être qu’on s’autorisera éthiquement à prendre plus de risques

J’ai survolé l’article. L’auteur de l’article n’y connaît rien en médecine. L’étude de Raoult ça ne vaut rien pour une utilisation clinique.

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