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Le Ringer Lactate est sûr en cas d’hyperkaliémie et c’est mieux que le salé

Cet article est la traduction d’un billet  de Josh Farkas du blog PulmCrit.org. (NB je continue d’utiliser le pronom personnel à la première personne mais je ne suis pas l’auteur de ce billet)

Lutter contre les idées reçues : Le Ringer Lactate est sûr en cas d’hyperkaliémie, et c’est mieux que la solution salée isotonique.
Introduction

Il y a quelques mois, j’ai fait une longue note sur le remplissage vasculaire en fonction du pH du patient . J’y ai déjà discuté le fait que l’utilisation du Ringer Lactate (RL) est sûre en cas d’hyperkaliémie. Malgré tout lutter contre les idées reçues reste difficile.  Le dogme comme quoi le RL doit être évité en cas d’hyperkaliémie continue d’être suivi que ça soit dans la vraie vie ou dans les réseaux sociaux. Ce mythe me rend dingue parce que je trouve que c’est non seulement faux mais il s’agit en plus une erreur de raisonnement. J’ai écrit ce billet pour essayer de démystifier cette situation.

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Mon ami le potassium

 Le potassium c’est dangereux, c’est un des premiers trucs qu’on apprend en médecine : il ne fait pas bon avoir 7 mmol/l de potassium dans le sang et il faut être très vigilant lors des prescriptions de supplémentation intraveineuse. Une kaliémie (très) élevée tue.

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Cependant je préfère voir le potassium à 4,5 qu’à 3,5 mmol/l sur le ionogramme de mes patients, surtout en contexte post-opératoire. Il y a beaucoup de raisons qui concourent à trouver une hypokaliémie en post-opératoire : dénutrition, diminution des apports oraux, aspiration gastrique, diurétiques, nutrition parentérale, insuline. La renutrition trop rapide peut même aboutir à une hypokaliémie et une hypophosphorémie profonde avec des conséquences dramatiques. Il faut donc être particulièrement méfiant chez les grands dénutris, anticiper et surveiller.

Le potassium est le principal cation intracellulaire. Il est indispensable au maintient de la polarisation cellulaire et le travail de la Na/K ATPase représente probablement à l’échelle de l’organisme une proportion énorme de notre dépense énergétique de repos. Inutile de vous rappeler que le respect de ce gradient électrochimique est utile pour échapper à des tas de dysfonctionnements cardio-vasculaires ou neurologiques. Le potassium est également un cofacteur de la pyruvate kinase, enzyme plutôt utile.

Revenons à nos moutons : la kaliémie « normale-haute ». Pour ça j’essaye d’anticiper les apports chez les patients opérés, j’utilise préférentiellement le Ringer Lactate pendant les blocs, je veille à apporter régulièrement un peu de magnésium et je supplémente volontiers en phosphate dipotassique (contexte d’hypokaliémie/hypophosphorémie) ou en chlorure de potassium (en me souvenant de la chlorémie du patient). Il faut bien se souvenir que le pool potassique de l’organisme est énorme. Ainsi je pense qu’en dehors d’une fonction rénale précaire il est plus efficace d’apporter franchement le potassium (sur l’intervalle correct pour être safe bien sûr). Je retiens qu’il faut approximativement 200  mmol de potassium pour élever la kaliémie de 1 mmol/l chez un patient franchement carencé (attention aux contexte de transfert intracellulaire).  200 mmol d’ion K+ se trouve dans 15g de KCl

Par contre dès que la voie per os est utilisable, hop, potassium par la bouche, plus sécu et tout aussi utile ! De plus la physiologie est bien faite, si l’intestin et le rein sont fonctionnels ils ne se laisseront pas déborder par des apports élevés en potassium per os.

Je chasse donc activement les hypokaliémies qui favoriseraient la constipation, l’arythmie ou la faiblesse musculaire.

Je pense vraiment que la physiologie aime le potassium. Il y a beaucoup de travaux qui s’intéressent au déséquilibre entre les apports sodés et potassiques dans la genèse des pathologies cardio-vasculaires comme l’hypertension. Une alimentation riche en potassium (fruits et légumes) est régulièrement associée à des bénéfices sanitaires dans les études épidémiologiques.

D’autres sujets connexes sont passionnants comme l’utilité du mélange glucose-insuline-potassium (GIK) dans l’ischémie myocardique et les nouvelles pistes du rôle des pompes Na/K dans la régulation du cycle cellulaire. Mais c’est un tout autre sujet…

D’Elia, L., Barba, G., Cappuccio, F. P., & Strazzullo, P. (2011). Potassium intake, stroke, and cardiovascular disease a meta-analysis of prospective studies. Journal of the American College of Cardiology, 57(10), 1210–1219. https://doi.org/10.1016/j.jacc.2010.09.070
He, F. J., & MacGregor, G. A. (2001). Beneficial effects of potassium. BMJ, 323(7311), 497–501. https://doi.org/10.1136/bmj.323.7311.497
Adrogué, H. J., & Madias, N. E. (2014). Sodium surfeit and potassium deficit: keys to the pathogenesis of hypertension. Journal of the American Society of Hypertension: JASH, 8(3), 203–213. https://doi.org/10.1016/j.jash.2013.09.003 Download
Babula, P., Masarik, M., Adam, V., Provaznik, I., & Kizek, R. (2013). From Na+/K+-ATPase and cardiac glycosides to cytotoxicity and cancer treatment. Anti-Cancer Agents in Medicinal Chemistry, 13(7), 1069–1087.
Cheng, C.-J., Kuo, E., & Huang, C.-L. (2013). Extracellular potassium homeostasis: insights from hypokalemic periodic paralysis. Seminars in Nephrology, 33(3), 237–247. https://doi.org/10.1016/j.semnephrol.2013.04.004
Pardo, L. A., & Stühmer, W. (2014). The roles of K(+) channels in cancer. Nature Reviews. Cancer, 14(1), 39–48. https://doi.org/10.1038/nrc3635
Youn, J. H. (2013). Gut sensing of potassium intake and its role in potassium homeostasis. Seminars in Nephrology, 33(3), 248–256. https://doi.org/10.1016/j.semnephrol.2013.04.005
Aaron, K. J., & Sanders, P. W. (2013). Role of dietary salt and potassium intake in cardiovascular health and disease: a review of the evidence. Mayo Clinic Proceedings, 88(9), 987–995. https://doi.org/10.1016/j.mayocp.2013.06.005
Grossman, A. N., Opie, L. H., Beshansky, J. R., Ingwall, J. S., Rackley, C. E., & Selker, H. P. (2013). Glucose-insulin-potassium revived: current status in acute coronary syndromes and the energy-depleted heart. Circulation, 127(9), 1040–1048. https://doi.org/10.1161/CIRCULATIONAHA.112.130625
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Kaliémie et aspiration gastrique

Pour écrire la note sur hypokaliémie et magnésium j’ai ouvert deux livres-symboles de ma bibliothèque : « Physiologie rénale et désordres hydroélectrolytiques » et « Clinical Physiology of Acid-Base and Electrolyte Disorders« . Dans le chapitre sur les étiologies des hypokaliémies, j’ai relu le paragraphe sur hypokaliémie et aspiration gastrique. J’ai (ré)appris la physiopathologie de ce trouble et je trouve surtout que c’est une belle illustration d’un problème médical courant : le raccourci.

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Magnésium et hypokaliémie

Le magnésium est beaucoup utilisé en anesthésie-réanimation. On dispose de deux formes pour une administration IV : le sulfate de magnésium (MgSO4) et le chlorure de Magnesium (MgCl2).